Proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, tendant à mieux maîtriser le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales et à simplifier certaines normes réglementaires relatives à la pratique et aux équipements sportifs

Cosignataire

Exposé des motifs

Le Président du Sénat a souhaité qu'une dynamique de simplification des normes applicables aux collectivités territoriales soit engagée par les instances de la Haute assemblée chargées de cette question à laquelle les élus locaux sont confrontés quotidiennement.

Ces dernières années, le sujet des normes relatives aux équipements sportifs des collectivités est devenu de plus en plus délicat à gérer pour nombre d'élus locaux. Si ces derniers sont parfaitement disposés à appliquer l'ensemble des normes indispensables, notamment en matière de sécurité et d'accessibilité, la multiplication de celles-ci et leur application sans discernement revient à ne plus distinguer des mesures véritablement utiles des contraintes coûteuses et sans objet.

Sur le terrain, l'élu local est en effet soumis à une pression normative issue de divers producteurs autonomes de normes sur lesquels il n'a que très peu de prise.

Il doit d'abord faire face à la norme générale, celle produite par l'exécutif, et dans une certaine mesure par le législateur lui-même, s'agissant par exemple des règles relatives aux établissements recevant du public ou des normes d'accessibilité aux personnes handicapées. Dans ce domaine, les fédérations sportives ne font d'ailleurs qu'appliquer purement et simplement des normes dont elles ne sont pas responsables.

Il doit, ensuite, faire face aux normes réglementaires déterminées par les fédérations sportives délégataires. Au-delà des normes dictées par les exigences de la pratique sportive, sur lesquelles les fédérations nationales n'ont parfois aucune prise (normes internationales sur la taille des terrains ou des zones de sécurité), s'ajoutent aussi des recommandations de caractère non obligatoire motivées cette fois par des préoccupations d'ordre commercial (telles que celles qui touchent à la contenance minimale des espaces affectés à l'accueil du public pour chaque type de compétition ou à la détermination de dispositifs électriques et d'installations destinés à favoriser la retransmission télévisée des compétitions).

Il doit enfin faire face aux normes d'homologation (normes AFNOR relatives aux équipements par exemple) de plus en plus nombreuses et qui visent à garantir aux propriétaires d'équipements et aux usagers que les installations peuvent être utilisées conformément à leur destination et en toute sécurité. Ces normes pourtant considérées comme des normes « volontaires », c'est à dire opposables que si elles ont été reconnues comme étant obligatoires par les acteurs, sont souvent vues par le juge comme des normes impératives.

Cette complexité dans l'origine de la production normative doit être rappelée, car l'élu local, au carrefour de ces trois points d'entrée de la norme sportive, a besoin de clarification. Il attend que ces normes se conjuguent avec intelligence et retenue et non plus seulement qu'elles s'additionnent les unes aux autres pour créer un environnement juridique incertain potentiellement préjudiciable tant aux sportifs qu'au public et aux acteurs locaux dont la responsabilité peut être engagée. Plusieurs travaux récents recommandaient d'agir dans le sens de la simplification dans ce domaine. En mars 2013, le rapport de MM. Alain LAMBERT et Jean-Claude BOULARD sur la lutte contre l'inflation normative dénonçait déjà « les coûts élevés des exigences formulées par les fédérations », « l'instabilité normative » résultant de leur caractère « excessivement évolutif », « l'absence de toute harmonisation entre les normes des différentes fédérations », qui rend souvent « difficile l'usage polyvalent d'un même équipement », le caractère parfois « contradictoire » des normes réglementaires fédérales avec celles fixées par ailleurs en vue d'autres objectifs (sécurité, environnement). Ces appréciations ont été corroborées par d'autres travaux, en particulier le rapport d'avril 2014 de la mission commune d'information du Sénat sur le sport professionnel et les collectivités territoriales présidée par notre collègue M. Michel SAVIN. En 2015, un rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) confirmait la nécessaire régulation des normes sportives applicables aux collectivités territoriales.

Ces dernières s'inquiètent d'une réglementation qui peut leur paraître excessive et s'interrogent sur la justification de nouvelles normes toujours plus nombreuses. L'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES) rappelle qu'il existe 400 000 normes, réglementations et prescriptions applicables aux collectivités territoriales dans ce domaine. Ces normes (relatives aux capacités d'accueil, d'éclairage, de règles de jeu, de confort des installations) qui sont applicables aux quelque 250 000 équipements, espaces et sites sportifs dont les collectivités territoriales sont propriétaires, impactent aujourd'hui lourdement leurs finances.

C'est dans cette perspective que la délégation aux collectivités territoriales et la commission de la culture, de l'éducation et de la communication ont constitué un groupe de travail sur « les normes sportives applicables aux collectivités territoriales ». Composé de MM. Dominique DE LEGGE (Les Républicains - Ille-et-Vilaine), Christian MANABLE (Socialiste et républicain - Somme), Mme Christine PRUNAUD (Communiste républicain et citoyen - Côtes-d'Armor) et M. Michel SAVIN (Les Républicains - Isère), ce groupe de travail a auditionné, entre mars et juillet 2017, tous les acteurs concernés. Les rapporteurs ont pu recueillir l'avis des grandes fédérations sportives, des ligues professionnelles, des représentants des collectivités territoriales, du ministère des sports, des instances nationales spécialisées, ainsi que des fabricants et équipementiers de l'industrie du sport.

Si les collectivités territoriales sont aujourd'hui les premiers financeurs du sport, assurant 70 % des financements publics, elles sont aussi et surtout les premiers propriétaires d'équipements sportifs en France. Elles doivent ainsi faire face à deux contraintes. La première est le dynamisme sportif des clubs : les élus locaux sont régulièrement amenés à investir dans des équipements qui coûtent cher, notamment en cas de passage d'un club ou d'une équipe à une division supérieure. La seconde est l'application des normes réglementaires fixées par les fédérations sportives. Il faut alors distinguer le cas des équipements qui ne sont plus aux normes en raison de nouvelles règles édictées par les fédérations, de l'hypothèse où le passage d'une division à une autre modifie le niveau d'homologation et impose des investissements importants aux collectivités pour appliquer les normes correspondantes.

Sur le terrain, si les élus locaux réclament de simplifier concrètement les normes dans ce domaine, ils regrettent surtout le comportement ambigu de certaines fédérations entre ce qui relève d'une prescription obligatoire ou d'une simple recommandation. Ceux-ci ne disposent souvent pas de la connaissance suffisante pour opérer cette distinction. Ils dénoncent aussi régulièrement l'édiction de normes qu'ils jugent « hors-sol » au mépris de toute consultation des collectivités concernées.

Il convient de préciser que le pouvoir normatif des fédérations n'est qu'un pouvoir réglementaire subdélégué pour l'organisation du service public du sport et confié par le ministère des sports à des personnes privées. Si la loi les autorise à fixer des normes applicables aux équipements sportifs nécessaires au bon déroulement des compétitions, cette habilitation s'entend pour de stricts motifs de police, à savoir liés essentiellement aux conditions d'hygiène et de sécurité dans la pratique sportive. Il faut donc rappeler aux élus locaux que les normes des fédérations ne s'appliquent qu'aux infrastructures destinées à accueillir des compétitions sportives. Dès lors, sur le reste, les collectivités territoriales n'ont absolument aucune obligation de suivre les recommandations commerciales des ligues ou des fédérations.

Il convient par ailleurs de souligner que toutes les normes nouvelles ne sont pas systématiquement inutiles. Des normes peuvent être souhaitables, sur la qualité des sols par exemple lorsqu'elles peuvent éviter la traumatologie des sportifs ou assurer une meilleure pratique du sport (meilleur rebond des balles, etc.). Les normes peuvent ainsi avoir des objectifs de sécurité, tout autant que des objectifs d'efficacité économique.

Enfin, les normes résultent parfois de grands objectifs de politique publique, portés par les gouvernements successifs, que ce soit en matière de lutte contre les discriminations, d'accessibilité au sport pour les handicapés, ou encore d'égalité entre les sexes dans le sport. Les fédérations sportives qui ne font qu'appliquer ces grands objectifs reportent ainsi la charge normative sur les clubs et les collectivités territoriales.

La question de l'impact des normes sportives mérite donc d'être abordée objectivement et dans toutes ses composantes. Les élus locaux, faut-il le rappeler, ne veulent pas moins de normes, mais souhaitent moins de normes inutiles. Ils veulent la bonne norme au bon endroit.

Depuis le 27 mars 2009, une Commission d'examen des projets de règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs (CERFRES) tente d'exercer, avec d'autres élus - les représentants de l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES), des départements et des régions - un contrôle sur la production normative des fédérations sportives. Formation restreinte du Centre national pour le développement du sport (CNDS), la CERFRES est ainsi consultée sur tous les projets de norme nouvelle d'une fédération délégataire relative aux équipements sportifs requis pour accueillir les compétitions (articles R. 142-1 à R. 142-15 du code du sport).

Si sa création a permis de circonscrire le champ de compétence des fédérations sportives, de responsabiliser celles-ci et de favoriser la concertation avec les collectivités territoriales maîtres d'ouvrage, des améliorations peuvent encore être envisagées.

1) La présente proposition de résolution vise à renforcer la composition et les attributions de la CERFRES

Il existe un consensus largement partagé selon lequel la CERFRES est aujourd'hui un lieu unique de négociation et de concertation considéré comme légitime et efficace. Sa composition tripartite permet de réunir l'ensemble des acteurs concernés (État, collectivités territoriales, mouvement sportif). Elle permet en particulier aux représentants des collectivités territoriales d'être associés en amont à la production normative des fédérations sportives et de faire valoir leurs observations. La pratique a démontré que sur de nombreux sujets (vidange des piscines publiques, cages de but, résine collante des ballons de handball, etc.), les règlements des fédérations avaient évolué dans le bon sens sous la pression de cette commission où les décisions sont prises par consensus. Concrètement, grâce à la vigilance des élus locaux, des dépenses ont pu être évitées pour les collectivités territoriales. Le Sénat souhaite donc préserver cette instance de dialogue, tout en répondant à quelques imperfections actuelles.

· L'allongement des délais d'examen des projets de règlements fédéraux 

Aujourd'hui, deux périodes se succèdent dans la procédure d'examen des projets de règlements des fédérations sportives : une période de deux mois pendant laquelle les associations d'élus, les représentants de l'État et les autres fédérations sont consultés et peuvent échanger sur un projet de norme nouvelle d'une fédération sportive. C'est cette dernière qui mène la consultation sur le terrain et c'est au cours de cette période que les différentes parties consultées peuvent faire valoir leurs observations et ainsi faire évoluer le projet de norme fédérale. Cette réflexion en amont s'opère sur la base de la notice d'impact obligatoirement produite par la fédération concernée à l'appui de toute norme nouvelle ; une seconde période de deux mois s'ouvre ensuite afin de laisser à la CERFRES le temps de se prononcer sur la notice d'impact et les observations des parties prenantes et de rendre sa décision.

Si le délai laissé à la commission pour examiner les projets de règlements qui lui sont soumis, fixé à deux mois, semble constituer un délai raisonnable pour éviter de bloquer les évolutions du monde sportif, le délai de consultation sur l'étude d'impact mériterait d'être allongé à trois mois afin de donner aux différents acteurs le temps suffisant pour effectuer une analyse approfondie et permettre une fertilisation croisée entre les fédérations et une meilleure évaluation des impacts financiers pour les collectivités. Les notices d'impact préalables sont un outil qui doit être consolidé afin de valoriser le travail d'instruction en amont et sa bonne exploitation avant la décision finale de la CERFRES.

Il paraît également indispensable, de la part des fédérations, de toujours bien veiller à laisser du temps aux collectivités territoriales pour s'adapter à une norme nouvelle. Que ce soit pour la mise en conformité des équipements (lumières, protections autour des terrains...) ou des infrastructures elles-mêmes, les collectivités territoriales doivent pouvoir bénéficier d'un délai raisonnable et négocié de mise en conformité des équipements. Il serait donc souhaitable que les fédérations soient davantage sensibilisées à la nécessité de s'assurer d'un délai raisonnable dans leurs notices d'impact à travers, par exemple, l'élaboration d'échéanciers prévoyant une date butoir d'opposabilité des normes nouvelles. Les fédérations pourraient opportunément prévoir des échéanciers différents selon la taille de la collectivité laissant ainsi le temps aux collectivités territoriales de s'organiser.

· L'élargissement de sa composition

Le nombre d'élus locaux est aujourd'hui satisfaisant (6 membres sur les 18, issus de l'Association des maires de France, de l'Assemblée des départements de France et de Régions de France) en comparaison des représentants du monde sportif (6) et des services de l'État (6), d'autant que sa présidence est confiée à un élu local. La question se pose toutefois de l'élargissement à de nouvelles associations d'élus traduisant la prise en compte du monde rural, mais aussi des intercommunalités qui sont de plus en plus nombreuses à exercer des compétences en matière de sport. Il est donc recommandé de consulter l'Association des maires ruraux de France, France urbaine, ainsi que l'Assemblée des communautés de France afin d'envisager, avec eux, les modalités d'une représentation au sein de la CERFRES sans pour autant bouleverser l'équilibre tripartite.

Il pourrait également être pertinent de permettre à cette instance de bénéficier de l'expertise des fabricants d'équipements sportifs, qui regrettent à l'heure actuelle de ne pas pouvoir se réunir en amont avec les fédérations, les élus locaux et l'État, par exemple sur les normes AFNOR. Les fabricants sont actuellement les seuls à ne pas être autour de la table, privant ainsi la CERFRES de leur expérience et de leur connaissance de ce qui se fait dans d'autres pays, puisque ce sont en général des fabricants internationaux. Faire dialoguer les fabricants avec les fédérations et les élus locaux présenterait également l'avantage de concevoir en amont des équipements multi-usages dont l'utilisation par plusieurs disciplines sportives serait source d'économies substantielles pour les collectivités territoriales. Il est donc recommandé que la CERFRES constitue des groupes de travail associant en amont les fabricants d'équipements sportifs, sans que ceux-ci ne participent toutefois aux délibérations de cette instance.

· Le renforcement de ses prérogatives : amélioration de la portée du contrôle et auto-saisine

On constate qu'une partie des normes reste toutefois hors de la concertation qui se déroule au sein de la CERFRES dans la mesure où celle-ci ne connaît pas des labels d'ordres commerciaux et non contraignants établis par les ligues professionnelles. Ces labels reposent sur des guides de recommandations et d'accompagnement pour les porteurs de projets (sur les tribunes, sur la taille des vestiaires, sur l'éclairage dans les stades, sur les dispositifs audiovisuels, sur la création d'espaces VIP pour générer des revenus, sur les zones de chalandise, etc.). Le suivi de ces recommandations permet d'obtenir des points et le total des points permet d'obtenir ces fameux labels. Ces recommandations non obligatoires, souvent d'ordre purement commercial, sont pourtant ressenties comme une pression par les élus locaux. Il conviendrait donc que la CERFRES puisse se saisir de ces « normes grises » à mi-chemin entre la norme obligatoire et non obligatoire.

Jusqu'à présent, la CERFRES n'a pas de pouvoir de contrôle lorsque les règles édictées par les fédérations concernent les compétitions et non les équipements. Il peut pourtant arriver que les normes relatives aux compétitions aient un impact sur l'exploitation de l'infrastructure. Dans les faits, la CERFRES n'hésite pourtant pas à se saisir de ces règles, comme elle l'a fait s'agissant de l'interdiction de certaines résines collantes sur les ballons de handball. Il conviendrait de consacrer pleinement ce rôle en reconnaissant à la CERFRES un pouvoir d'avis dès lors qu'une décision relative à la compétition a une conséquence directe sur l'exploitation d'un équipement.

Si la saisine de la CERFRES est aujourd'hui obligatoire pour tous les règlements fédéraux, son avis reste en théorie consultatif puisqu'elle n'a pas de pouvoir contraignant à l'égard des normes édictées par les fédérations. Jusqu'à présent, il convient de se féliciter qu'aucune fédération n'a jamais passé outre l'avis de la CERFRES. Afin de préserver l'esprit de cette régulation souple, il apparaît nécessaire de rappeler la nécessité absolue que les avis de la CERFRES soient respectés par l'ensemble des acteurs.

Toujours dans l'esprit de cette régulation, il apparaîtrait utile d'ouvrir la possibilité pour la CERFRES de s'auto-saisir des difficultés rencontrées par les collectivités territoriales suite aux demandes des fédérations.

Afin de permettre également une meilleure évaluation des normes, la CERFRES pourrait, enfin, se voir reconnaître pour mission d'examiner a posteriori la mise en oeuvre des normes édictées par les fédérations, afin notamment de s'assurer que leurs engagements ont été tenus. Ces évaluations auraient vocation à permettre une révision régulière des normes pour tenir compte de l'expérience des collectivités territoriales.

· L'articulation avec le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) : utiliser les procédures existantes de saisine

Le droit actuel permet à la CERFRES, à la demande d'un tiers de ses membres, de soumettre au CNEN tout projet de texte d'une norme fédérale, avant que celle-ci ne rende son avis définitif. Cette faculté est aujourd'hui insuffisamment utilisée ; c'est pourquoi il conviendrait de la réactiver. Cette meilleure articulation entre la CERFRES et le CNEN devrait permettre d'instaurer un échange plus régulier afin d'adapter les normes aux situations (comme par exemple de ne pas prévoir systématiquement une accessibilité pour les fauteuils handicapés dans tous les cas), ce qui entraînerait des économies pour les collectivités territoriales.

Si la CERFRES compte bien un représentant titulaire et un représentant suppléant issu du CNEN, les élus ne souhaitent toutefois pas que celle-ci devienne une sous-commission du CNEN, et ce afin de maintenir la spécificité du monde sportif.

2) La présente proposition de résolution vise également à encadrer la production normative des fédérations sportives selon des principes de proportionnalité et d'adaptabilité

Il apparaît indispensable de changer l'approche entretenue vis-à-vis des normes afin que celles-ci s'adaptent mieux aux situations concrètes. L'exigence de proportionnalité des normes selon les équipements ou la taille des collectivités et celle d'adaptabilité des normes aux situations doivent guider l'action des prescripteurs de normes. Le législateur lui-même doit être pleinement conscient des efforts de simplification qu'il exige des autres producteurs de normes.

· Les normes sportives doivent répondre à une exigence de proportionnalité

Il conviendrait de mieux adapter les normes à l'usage réel d'un équipement. De nombreuses communes sont trop souvent sollicitées pour des normes qui apparaissent disproportionnées par rapport aux situations sur le terrain. Ainsi en est-il lorsqu'il est exigé des investissements sans rapport avec le niveau dans lequel évoluent en réalité certains clubs de petites communes (bancs de touche, barrières de protections entre joueurs et spectateurs, capacités d'accueil des stades, etc.) lorsque ceux-ci accèdent à un niveau de classement supérieur.

Il conviendrait également de s'assurer d'une proportionnalité des prescriptions selon qu'il s'agisse de manifestations sportives locales, régionales ou nationales, de sport amateur et/ou professionnel. Le cas de la fédération française de basket-ball qui a voulu adapter les tracés des terrains aux normes de la NBA, avec un coût d'investissement compris entre 20 000 et 25 000 euros par gymnase est un exemple à ne pas reproduire. L'application d'un principe de proportionnalité permettrait aussi de prendre en compte la taille de la collectivité afin de ne pas imposer les mêmes règles à une métropole et une commune rurale.

Tous les équipements sportifs de France n'ont pas vocation à accueillir des rencontres internationales ou de haut niveau. Il conviendrait donc de prévoir un classement des équipements sportifs au niveau national, afin de permettre une mutualisation au bénéfice des collectivités territoriales. Il s'agit d'un point important car les équipements pour les professionnels ne doivent pas concentrer tous les moyens et il paraît indispensable, dans l'ensemble de nos territoires, que les équipements pour les amateurs ne soient pas des équipements au rabais. Le Sénat sera particulièrement vigilant sur ce point.

· Les normes sportives doivent répondre à une exigence d'adaptabilité

Les élus locaux, en particulier dans les petites communes ou les territoires ruraux confrontés à des problèmes de moyens, réclament à juste titre une utilisation pluridisciplinaire des équipements sportifs. Il n'est pas facile, par exemple, d'utiliser le dojo de judo, qui répond à des normes très particulières, pour d'autres activités. Autre exemple type qui illustre les aberrations en matière de normes : on trouve autant de chaises d'arbitre que de sports pratiqués dans les gymnases : pour le tennis, le volley-ball, le badminton, etc.

L'intérêt général commande pourtant, pour limiter les coûts, de rendre ces infrastructures ou ces équipements accessibles à plusieurs types d'utilisateurs (en « multi-usage »). Il convient donc d'encourager les fédérations à dialoguer et à s'entendre pour l'utilisation d'un même équipement. Concrètement, les fédérations et les acteurs du monde du sport pourraient par exemple être encouragés à rédiger des « guides d'utilisation commune » des salles et des équipements sportifs. Pour prouver l'utilité de la coordination, on peut citer l'exemple du travail réalisé au sein de la CERFRES qui a conduit la Fédération française de football à modifier l'aire de penalty du football en salle de façon à l'adapter à celle du handball et ne pas créer d'aire de jeu supplémentaire. La présente proposition de résolution défend donc le principe de la polyvalence et du partage des équipements entre plusieurs disciplines.

L'adaptabilité commande ensuite de réfléchir selon les logiques de subsidiarité et de progressivité dans l'application des normes. Les textes des fédérations sportives devraient se borner à fixer des objectifs à atteindre, à charge pour les collectivités territoriales d'en définir les modalités d'application pour y parvenir. Le soin doit être laissé aux collectivités de définir les moyens selon les besoins locaux ou les réalités territoriales. Le principe de progressivité doit, de son côté, autoriser les collectivités à échelonner la mise en oeuvre d'une norme nouvelle selon un échéancier fixé en amont et tenant compte des contraintes locales.

En matière d'adaptabilité, il convient enfin de réfléchir particulièrement aux normes relatives aux établissements recevant du public (ERP) qui paraissent aujourd'hui insuffisamment adaptées au monde sportif. C'est notamment le cas s'agissant des normes d'accessibilité aux personnes handicapées. Le retard de notre pays en matière d'accessibilité aux équipements sportifs des personnes handicapées constitue encore une réalité qui justifie de faire des investissements dans ce secteur une priorité. Toutefois, sans remettre en cause l'effort nécessaire, on peut estimer qu'un plus grand discernement devrait permettre de mieux cibler les actions à conduire afin, en particulier, d'éviter que la généralisation d'une norme conçue pour l'ensemble des bâtiments accueillant du public aboutisse, dans le cas du sport, à une dépense sans objet. Si, par exemple, l'accessibilité aux fauteuils roulants des vestiaires d'arbitres peut être nécessaire dans un club de tennis ou de volley-ball, il n'est pas certain que cet investissement soit prioritaire pour des stades réservés à la pratique du football ou du rugby. Une priorisation des investissements nécessaires pour favoriser l'accessibilité des personnes handicapées dans le cadre d'une programmation locale souple pourrait in fine se révéler plus efficace que l'application automatique de normes qui ne tiennent pas compte des spécificités du sport.

· Envisager la mise à contribution des fédérations

Dans les cas où ces exigences sont insuffisantes, il serait souhaitable que les fédérations contribuent financièrement, selon des modalités à préciser et des moyens dont elles disposent, à l'impact des règlements fédéraux qu'elles édictent à travers une règle du « prescripteur-payeur ». Ainsi, tout surcoût financier pour les collectivités territoriales imputable aux fédérations sportives serait partagé, incitant ces dernières à la modération. Certaines fédérations qui disposent des moyens financiers accordent d'ailleurs des subventions aux clubs et non aux collectivités qui pourtant investissent dans les infrastructures. La participation financière des fédérations et des ligues apparaîtrait comme un juste retour envers les collectivités territoriales.