« Christophe Castaner doit réviser sa circulaire sur les municipales »

Publié le 24 janvier 2020

44 de mes collègues politistes demandent à leur tour le retrait de la circulaire Castaner pour les municipales

Le texte de notre tribune du JDD contre la circulaire du ministre de l’Intérieur pour les municipales

Emmanuel Macron manipule le scrutin

Alors que les sondages décourageants s’enchaînent, le gouvernement et les dirigeants de La République En Marche ont décidé d’enjamber le scrutin des municipales : depuis plusieurs semaines ils s’attèlent à rendre illisibles les résultats de mars, en changeant les règles de comptabilisation des votes et donc les scores de chaque parti politique.

À défaut de pouvoir revendiquer une victoire, tachons que personne ne le puisse, telle semble être la stratégie mise en œuvre par le président de la République et le parti au pouvoir. Il s’agit ni plus ni moins que d’organiser la disparition des oppositions, d’installer artificiellement une parole unique et de dissimuler une éventuelle sanction électorale.

Devant l’impossibilité manifeste d’investir en nombre suffisant des candidats aptes à mener une campagne et à bâtir des majorités municipales, LREM a d’abord introduit une subtilité sémantique distinguant « investitures » et « soutiens ». Ainsi, la stratégie du « coucou » a été privilégiée en multipliant ces soutiens à des maires sortants ; le plus souvent de droite.

Ces choix opportunistes sont avant tout destinés à brouiller les cartes, et si possible, à pouvoir revendiquer d’éventuelles victoires acquises par d’autres. L’objectif est donc bien d’obtenir un résultat électoral par tous les moyens et non pas de porter une vision, des valeurs, ou un programme proposé aux citoyens pour les six années à venir.

Cette stratégie ne s’encombre pas de principes. Tous les jours nous découvrons que figurent parmi les candidats investis par LREM des élus qui hier défilaient dans les cortèges de la Manif pour tous.

Avec 484 candidats LREM officialisés à ce stade (240 investitures et 244 soutiens), atteindre l’objectif des 10 000 élus locaux fixés par le parti présidentiel s’annonce ardu.

Une nouvelle étape vient donc d’être franchie par une circulaire du Ministre de l’intérieur. Elle donne instruction aux préfets de n’attribuer de nuances politiques qu’aux candidats des communes de plus de 9 000 habitants et non plus à partir de 1 000 habitants, comme aux précédentes municipales.

En présentant les résultats électoraux sur la base qui l’avantage le plus, le gouvernement surévalue volontairement et de façon artificielle les votes qu’aura obtenus LREM.

Les 8 754 communes de France qui comptent entre 1 000 et 9 000 habitants seraient ainsi dépourvues d’enjeux électoraux. Elles disparaissent littéralement. Tout comme leurs 23 millions d’habitants. On le voit, ce ne sont pas ici quelques communes rurales qui seront gommées ! Ce sont désormais 96 % des 35 000 communes de France et 50 % des électeurs qui échapperont aux résultats électoraux. Leur tort ? Appartenir à des territoires dans lesquels LREM n’a pas ou si peu d’existence et qui sont les perdants de la politique menée par le gouvernement.

Les choses vont encore plus loin. Ce qui s’opère est inédit. Il s’agit ni plus ni moins d’une violation alarmante de nos principes démocratiques pour une raison simple : les nouvelles règles édictées par le ministère de l’Intérieur permettront de comptabiliser au profit de LREM des votes qui ne leur sont pas directement destinés !

Pour cela, le gouvernement a créé sur mesure pour les partis de la majorité présidentielle une nouvelle catégorie politique : les listes « Divers centre ». Cette étiquette sera attribuée aux listes officiellement investies par LREM et ses alliés, mais surtout, - et c’est là que réside le scandale de cette circulaire – elle pourra l’être aussi aux listes qui n’ont pas été investies par la majorité présidentielle mais qui auront reçu son simple soutien, ou celui du MODEM.

Une règle qui bénéficie au seul parti au pouvoir et qui explique pourquoi la République en marche multiplie les déclarations de soutien.

Il suffit en effet à la direction de LREM d’affirmer son soutien à une liste pour que celle-ci soit demain enregistrée comme « divers centre » et peu importe qu’elle ne compte aucun candidat LREM.

Et l’électeur dans tout ça ? Ce n’est ni plus ni moins que le sens véritable de son vote qui pourra être détourné au profit de la majorité présidentielle. C’est un piétinement de l’expression du suffrage des électeurs.

 

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